Nous fuyons cette terre pourrie, dégarnie des rêves et des joies. Une éternité qui se dilate sous nos doigts trop tendres, des mensonges qu’on ne prétend même plus détenir comme vérité, voici le quotidien de Dorothy. C’était une lutte mélancolique contre la passion même, les courtes lumières de caprice sur une solitude punitive lui semblaient être des bourreaux bien plus cruels que les monstres de l’Espagne oubliée.
Mais ils étaient désormais seuls et pourtant si nombreux, loin de la terre et de ses accroches fertiles. Au milieu du Bleu, au milieu de cette étendue qui était son origine. Dorothy respirait ce bonheur tranquille de se savoir, pour toujours et à jamais, en résonance avec ce monde aquatique. Un éclat de rire perce ses pensées tandis que la bâteau doucement tange sous les vagues curieuses :
-Je t’avais bien dit que ça valait la peine.
Perdus dans l’Océan, Lucilius avait voulu l’accompagner. Cette bien sympathique créature, autre fils de Thanatos que son cœur portait cher et haut avait voulu voir à quoi ressemblait l’infini. D’un regard lancinant, elle se mit à parcourir les ombres qui drapaient son navire. Il y avait la sienne, cette femme allongée sur ce bois gondolé et il y avait l’homme, adossé à la bar, les yeux qu’elle pensait voir mi-clos :
-Tu penses à quoi ? Pas trop peur de chercher les emmerdes ? Normalement on a pas le droit de sortir t’sais. Il y a des glaces dans le petit frigo, si tu veux aussi. J’ai un peu la dalle.
Et les pensées s’entassent et se détruisent dans son esprit félin.